2 Octobre 1968. Le massacre de Tlatelolco

             Au Mexique, l’Histoire se répète, balbutie, trébuche parfois. Qui auraient su dire aux 43 étudiants d’Ayotzinapa qui voulaient commémorer le massacre du 2 octobre 1968 qu’ils allaient eux aussi connaître le même sort. Qui aurait pu prédire que ces étudiants de 2014 allaient entrer dans l’histoire sanglante du pays, au même titre que ceux de 1968.
Tout cela n’est pas le fruit de hasard, ce n’est ni affaire de coïncidence, ni de mauvais alignements des étoiles. Il s’agit d’un pays où les gouvernements systématiquement suppriment toutes velléités de résistance, où les disparitions forcées, la répression brutale n’est jamais condamnée. Un pays qui efface sa mémoire, trafique son histoire, assassine ses enfants est un pays en proie à toutes les dérives. L’impunité se veut l’antichambre de l’horreur où les puissants s’échangent les « bons » procédés et donnent le blanc-seing à ceux qui poursuivent son œuvre.
Mais le peuple lui aussi sait se servir de l’Histoire. Pour se souvenir, ne pas oublier, réclamer Justice. C’est pour cela que ce 2 octobre, au même titre que le 26 septembre, ils reprennent la rue pour crier, exiger que cette violence d’État cesse. Ce 2 Octobre 2019, le peuple se remet en marche. Au Mexique, l’Histoire convulsionne. Il n’y a plus aucun doute.

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A 5 años nos siguen faltando 43!

Ayotzinapa. Cinq ans de trop!

             26 septembre 2019. Cinq ans déjà. Cinq ans que les 43 étudiants d’Ayotzinapa manquent à l’appel (1). Une date qui revient chaque année un peu plus cruellement. Une date qui ronge inexorablement l’espoir, qui rend l’absence chaque jour un peu plus insupportable. Et le silence un peu plus mordant. Quasi insupportable au milieu de toutes ces questions sans réponses. Pourtant la détermination des parents reste intacte. Et chaque 26 du mois, ils répondent présents pour affirmer leur quête de vérité.

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Ayotzinapa. La grande manipulation.

             Ayotzinapa. Juin 2018. 45 mois d’absence. 1369 jours d’une douleur indicible. L’impunité prime toujours. Le silence complice de l’État continue de tisser son sombre linceul. La Justice n’a jamais daigné jeter le moindre coup d’œil du côté de l’Armée. Et le manque se fait chaque jour plus cruel. Mais pour autant, en ce mois de juin 2018, quelques nouvelles vont redonner de l’espoir.

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Guerrero blues

             En voyage, il est tellement facile de rencontrer des gens. Se faire des amitiés comme on vivrait un amour d’été. Intense, rapide, pour finalement, rentrer chez soi, dans son univers rassurant où on oublierait tout. Puis, un jour, l’envie revient. Rejoindre ce Mexique qui ne nous a jamais vraiment quittés.
Une évidence, retrouver les gens de la CIPEC dans le Guerrero, avec un peu la crainte que ces trois années n’est changé quelque chose. Mais, il suffit de s’asseoir à leur table, retrouver le sourire d’Edna, la faconde de Don Robert, la douceur de Doña Clara pour qu’en seulement quelques minutes, tout redevienne comme avant. La discussion reprend son fil où on l’avait laissée ou presque. Mais à l’intonation des voix, on sent que quelque chose a changé. Pas eux, non ! Plutôt la situation dans le Guerrero. À voir, leur regard s’égarer, leurs mots buter sur un silence, on se dit qu’il y a comme une désespérance dans l’air. Poisseuse et triste. Inédite… Lire la suite

Ayotzinapa. Un noël de trop.

             26 novembre 2017. Un froid glacial parcourt les rues de Mexico DF, la capitale du pays. Des buildings de vitres et d’acier reflètent un pâle soleil d’hiver. Même l’ange de l’indépendance tout en haut de son piédestal semble frigorifié. En bas, une clameur aussi glaçante que l’air ambiant « Vivos se los llevaron, vivos los queremos » (1). Depuis ce funeste 26 septembre 2014, c’est le cri de ralliement des parents et soutiens des 43 disparus de l’école normale d’Ayotzinapa (2).
38 mois, plus de 1000 jours que des mères pleurent leur fils, que des pères attendent des nouvelles, que des familles recherchent la vérité. Et toutes ces nuits sans sommeil, toutes ces manifs pour réclamer justice, tous ces rendez-vous inutiles avec le gouvernement pour tenter d’approcher l’innommable. Aujourd’hui, cette marche en est une parmi tant d’autres. Une de plus. Mais ce ne sera pas la dernière. Les parents ne renonceront jamais. Leur seul credo : «  Verdad y Justicia ».

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Rigoberta Menchú. Sans honte et sans mémoire.

            RIGO I

               Souvent le pouvoir tourne la tête, le vertige des sommets facilite les faux pas. Rigoberta Menchú, prix Nobel de la paix en 1992, vient d’accomplir l’impensable. Sans remord et sans honte.

              Au Mexique, les parents des quarante-trois disparus d’Ayotzinapa multiplient les actions pour ne pas qu’on les oublie. Dans le Guerrero, ils sont prêt à tout pour empêcher les prochaines élections du 7 juin afin d’éviter que ce système, corrompu jusqu’à la moelle, ne se reproduiseà l’identique. Jamais, ces parents éplorés n’auraient pu imaginer qu’une indigène, victime des horreurs de la guerre puisse se retourner contre eux. Contre ses semblables. Impardonnable.
Pour une somme de dix millions de dollars, Rigoberta Menchú a acceptée d’être observatrice électorale. Pour cela, le 26 mai 2015, elle a participé à une conférence de presse de l’Institut National pour les Elections (INE). Une vidéo circule où on la voit, entourée de petits fonctionnaires, en train de promouvoir cette farce électorale. Lorenzo Córdova, un des conseiller de l’INE, a présenté le prix Nobel de la Paix, comme « une femme reconnue au niveau international par sa lutte incessante pour la défense des droits des peuples indigènes, ainsi que par ses convictions sur la paix ». Mais de qui se moque-t-on ?
Rigoberta Menchú vend sa dignité, son âme au diable, à cet état mexicain aux mains pleines de sang, tout autant que celui du Guatemala qu’elle combattait hier encore, avec forces et convictions. Mais sûrement que Rigoberta à la mémoire courte…

             Mais son cynisme va encore plus loin, lors d’une « Conférence Magistrale pour la Démocratie et la Culture de paix », réalisée à Acapulco, elle osera demander une minute de silence pour tous les disparus. Une jeune femme de l’assistance interrompit ce mielleux discours en déclarant : « Nous ne pouvons pas continuer à demander une minute de silence par tous les disparus parce que demander une minute de silence pour chaque disparue et pour chaque personne assassinée dans notre pays, cela signifie que nous allons devoir nous taire jusqu’à la fin de nos jours ». Les personnes à la tribune n’ont pas répondu. Leur silence étant plus éloquent que n’importe quelle répartie bien cinglante.

             Face à cette mascarade, les masques tombent. Plus personne n’est dupe et désormais, Rigoberta Menchu fera partie de la longue liste des politiques qui ont perdus leurs idéaux en route. Leur seule obsession, le pouvoir. Mais dans le Guerrero, ils ont une longue tradition de lutte, ils n’ont plus peur des politiciens véreux. Ils iront jusqu’au bout avec comme seul slogan : « Vivos se los llevaron. Vivos los queremos ! ». Ils n’ont plus rien à perdre. Ils ont déjà tout perdu sauf leur dignité et leur soif de justice. Aussi grande que leur douleur.

Santander de Quilichao, Colombie, 30 Mai 2015.

Pour plus de détails, un article très bien fait de Pueblos en Caminos, en espagnol :
http://www.pueblosencamino.org/index.php/joomla-stuff-mainmenu-26/search-mainmenu-5/1351-rigoberta-menchu-la-sin-vergueenza

Ayotzinapa. Six mois de combat et de douleur.

             Octobre 2014, premier pas au Mexique sous le signe d’Ayotzinapa. Quarante-trois étudiants disparus. Trois vies écourtées, saccagées par la police municipale d’Iguala, épaulée par les narco-trafiquants du Guerrero. Une tragédie humaine à l’échelle de tout un pays.
Face à l’intolérable, les parents, l’espoir chevillé au corps, recherchent leurs enfants dans tous les coins du Guerre, jusque dans les garnisons militaires. Le pays, en larmes, réclame Justice. Le pays, en colère, laisse éclater sa douleur et sa rage dans la rue. Le 20 novembre 2014, manifestation historique, le peuple est dans la rue. L’état est au bord de l’implosion.

26 mars 2015

Aucune nouvelle des quarante-trois étudiants d’Ayotzinapa

             Six mois plus tard, un bref rappel des inepties du gouvernement d’Enrique Peña Nieto face à l’incroyable force de conviction des parents. Comme une véritable partie d’échec où Enrique avance un pion pensant mettre échec et mat l’opposition mais où les parents redoublent leur coup sans faillir. La partie est loin d’être terminée. La lucha sigue ! Sigue !!

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